FUSILLÉS POUR L'EXEMPLE
Histoire d’un combat pour la justice
Par Groupe Victor Hugo des Libres Penseurs 34
Lundi 18 juillet 2011
Entre 1914 et 1918, durant la Première Guerre mondiale, il y a eu une vague de Conseils de guerre envers les soldats français accusés de lâcheté, de désertion, de manque de courage, d’endormissement dans les tranchées, de refus de sortir des tranchées sous les feux des mitrailleuses ou sous les obus de canons, et parfois, plus simplement, d’avoir eu le malheur d’être choisis au hasard pour faire un exemple.
En tout, on recense 2 500 condamnations à mort dont 650 furent réellement exécutées. Les remises de grâce qui transmutaient les poteaux d’exécution en bagne sont passées par là. A cela s’ajoutent des centaines, au moins, d’exécutions sommaires, des années de bagnes effroyables débouchant souvent sur la mort pour des milliers de soldats déportés hors métropole et une répression accrue contre les troupes coloniales. Le bilan est lourd, le bilan est tragique. Il s’agit d’un drame qu’il faut réparer, pour les vivants et pour les morts.
La réalité des fusillades
Contrairement à une légende construite après coup, pour des raisons politiques, la vague des assassinats « légaux » de poilus ne date pas des mutineries de 1917, en contre coup de la Révolution russe.
En septembre 1914, le front craque sous la pression des armées allemandes. C’est la panique à Paris, au gouvernement et dans l’Etat-major. Le gouvernement donne plein pouvoir à l’armée pour résister aux « teutons » qui sont à 30 kilomètres de Paris.Les fusillades et les exécutions sommaires commencent. Elles ne s’arrêteront plus.
Dès septembre 1914, la répression s’abat sur les troupes françaises pour les terroriser et les faire tenir. 1914, 1915, 1916 sont les années noires où fleurissent les poteaux d’exécution sur le front. Des soldats français sont assassinés par d’autres soldats français, sur ordre des brutes galonnées, soigneusement à l’abri à l’arrière.
Ces 650 soldats ne sont pas morts « pour la France », mais morts par la France. Cette sauvagerie barbare fait aussi des ravages dans les armées du Royaume-Uni où 306 soldats seront passés par les armes. Il y en aura plus de 1 000 dans les armées italiennes.
Paradoxalement, les fusillades pour l’exemple n’auront guère cours dans les armées allemandes et pas du tout dans les armées nord-américaines. Il est vrai que celles-ci arrivent, en quelque sorte, après la bataille en 1917 où les fusillades diminuent considérablement. L’année 1917 connaît peu, en réalité, d’exécutions pour l’exemple.
Cela n’aurait fait que mettre le feu aux poudres sur un front exacerbé par la longueur de la guerre et les sacrifices imposés.
En 1916, le combat commence
Dès 1916, plus encore en 1917, des voix s’élèveront, notamment celle
de Pierre Brizon, pour dénoncer les exécutions. Les députés internationalistes, ils ne seront que 3, voteront d’un même élan contre les crédits de guerre et réclameront l’arrêt des exécutions de
soldats. Malgré la censure et la répression par la présence permanente des troupes de gendarmerie pour que l’ordre règne dans les tranchées, la nouvelle arrive quand même à l’arrière : on tue des
soldats français sur ordre de l’État-major.
Le Grand Orient de France va commencer à faire bouger des francs-maçons pour que la tuerie s’arrête. Jusqu’en 1935, les Enfants de la Veuve vont se mobiliser pour la réhabilitation des 650 fusillés. Les Loges maçonniques se feront discrètes, laissant le soin à ses membres, à travers la Ligue des Droits de l’Homme et, après la guerre, par les associations d’anciens combattants, d’agir publiquement.« L’affaire des fiches » du début du siècle étant encore dans toutes les mémoires, les francs-maçons n’apparaissent pas au grand jour dans cette bataille de justice. Mais c’est, incontestablement, le Grand Orient de France qui est à l’origine de la campagne pour la réhabilitation.
Quelques cas, mais pas encore une cause
Entre 1916 et 1935, il y a eu une cinquantaine de réhabilitations, souvent individuelles, des soldats fusillés pour l’exemple. Il va donc en rester 600 à qui il faudra rendre justice. Cette action va engager une mobilisation croissante dans l’opinion publique entre les deux Guerres mondiales. La Ligue des Droits de l’Homme et surtout les Associations d’anciens combattants, dont l’Association Républicaine des Anciens Combattants (ARAC), entreprendront des actions incessantes pour obtenir gain de cause.
Dans cette situation, va se constituer une commission d’experts, avec des avocats, des juristes, des parlementaires, des anciens combattants pour faire la lumière sur les conseils de guerre. Le bilan que l’on doit tirer est plus que mitigé. Selon la formule célèbre de Clemenceau, cette commission a plus enterré de problèmes qu’elle n’en a résolus.
C’est pourquoi la Fédération nationale de la Libre Pensée n’est guère partisane de recommencer aujourd’hui ce qui a si mal marché hier. Cette campagne de réhabilitation a bien sur été stoppée par la Deuxième Guerre mondiale. Et puis, Philippe Pétain étant chef de l’État, il ne fallait pas indisposer le « vainqueur de Verdun ».
A la Libération, le pays est occupé à autre chose, le Général de Gaulle n’allait pas attaquer l’armée dont il tirait une partie de sa légitimité. Il ne fallait pas non plus indisposer « le vainqueur venu d’Alger »
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Par Groupe Victor Hugo des Libres Penseurs 34
Vendredi 9 novembre 2012 22:52
Le Ministre des Anciens Combattants vient de décider d’attribuer la notion «pour la France» à un soldat français fusillé en 1914 par les balles françaises.
Marc BLONDEL, Président de la Fédération Nationale de la Libre Pensée rappelle que depuis plusieurs années la FNLP, l’ARAC, l’Union Pacifiste de France, le mouvement de la Paix et la Ligue des Droits de l’Homme réclament la réhabilitation de tous les fusillés pour l’exemple, qu’ils aient été jugés ou non.
C’est la raison pour laquelle la réhabilitation doit être collective. Il ne s’agit ni d’une amnistie, ni d’un pardon, et le but n’est pas exclusivement de faire mentionner la notion «pour la France» sur leur tombe ou sur un monument commémoratif.
Cette année plus de 65 manifestations auront lieu devant les monuments pacifistes le 11 novembre, le Président de la République devra en tenir compte lors de son intervention.
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8 novembre 2013
- Il y eut Lionel Jospin, en 1998, qui déclarait qu’il fallait réintégrer les Fusillés pour l’exemple dans la mémoire collective.
- Il y eut ensuite, en 2008, Nicolas Sarkozy qui reconnaissait qu’ils n’étaient pas des lâches.
- Il y a maintenant François Hollande, en 2013, qui souhaite qu’il y ait un espace pour les Fusillés pour l’exemple au Musée des Invalides.
Aucun n’a prononcé les seuls mots qui comptent : Réhabilitation collective !
Toute honte bue, le Président de la République ose dire que la construction de l’Europe est la réponse de paix. Or, les poilus et les Fusillés pour l’exemple ont été victimes de l’Europe en marche. C’est toujours au nom d’une certaine vision de l’Europe que l’on a massacré les peuples. Il faudra bien qu’un jour, les gouvernements de droite et de gauche s’expliquent sur cette lâcheté collective : celle du refus de rendre justice pour les victimes des pelotons d’exécutions.
Honte à tous ces gouvernements !
La Libre Pensée appelle tous ceux, qui sont révoltés par cette décision d’injustice du Président de la République, à se regrouper massivement dans les rassemblements pacifistes autour du 11 novembre, à l’initiative de la Libre Pensée, afin d’exprimer la colère qui envahit tous les pacifistes internationalistes à l’audition des propos de François Hollande. Celui-ci s’est parjuré. En tant que Président du Conseil général de la Corrèze, il s’était prononcé pour la réhabilitation collective. En tant que Président de la République, il s’est désavoué lui-même. Il ne sera pas dit que dans le pays d’Alfred Dreyfus et de Jean Jaurès, justice ne sera pas rendue aux victimes des pelotons d’exécutions.
Une deuxième fois, par la déclaration de François Hollande, les 650 Fusillés ont été exécutés par la France.
Honte à tous ceux qui refusent de rendre la justice !
« La lâcheté est presque toujours dû à la simple incapacité de suspendre l’activité de son imagination » - Ernest Hemingway –
Loin des mots fades, des vœux pieux et des discours creux, la seule voie possible pour que les mots Liberté –Égalité –Fraternité aient un sens :
Réhabilitation collectives des Fusillés pour l’exemple !
Toute autre voie n’est qu’une duperie et une mascarade.