JEAN-PAUL MARAT (2)
Jean-Paul Marat, les Chaînes de l'esclavage
De l’ignorance
C'est par l'opinion que les princes règnent en maîtres absolus. Eux-mêmes sont bien convaincus de ce principe : ils ont beau être entreprenants, audacieux, téméraires, ils n'osent pas violer les lois de propos délibéré. Quelque crime qu'ils commettent, toujours ils tâchent de les couvrir d'un voile, et toujours ils ont soin de ne pas révolter les esprits.
L'opinion est fondée sur l'ignorance, et l'ignorance favorise extrêmement le despotisme.
C'est elle qui, tenant le bandeau sur les yeux des peuples, les empêche de connaître leurs droits, d'en sentir le prix, et de les défendre.
C'est elle qui, leur voilant les projets ambitieux des princes, les empêche de prévenir les usurpations de l'injustice puissance, d'arrêter ses progrès, et de la renverser.
C'est elle qui, leur cachant les noirs complots, les sourdes menées, les profonds artifices des princes contre la liberté, leur fait donner dans toutes les embûches, et se prendre perpétuellement aux mêmes pièges.
C'est elle qui, les rendant dupes de tant de préceptes mensongers, leur lie les mains, plie leurs têtes au joug, et leur fait recevoir en silence les ordres arbitraires des despotes.
C'est elle, en un mot, qui les porte à rendre avec soumission aux tyrans tous les devoirs qu'ils exigent, et les fait révérer du crédule vulgaire comme des dieux.
Pour soumettre les hommes, on travaille d'abord à les aveugler.
Convaincus de l'injustice de leurs prétentions, et sentant qu'ils ont tout à craindre d'un peuple éclairé sur ses droits, les princes s'attachent à lui ôter tout moyen de s'instruire. Persuadé d'ailleurs combien il est commode de régner sur un peuple abruti, ils s'efforcent de le rendre tel. Que d'obstacles n'opposent-ils pas aux progrès des lumières ? Les uns bannissent les lettres de leurs Etats ; les autres défendent à leurs sujets de voyager ; d'autres empêchent le peuple de réfléchir, en l'amusant continuellement par des parades, des spectacles, des fêtes, ou en le livrant aux fureurs du jeu : tous s'élèvent contre les sages qui consacrent leur voix et leur plume à défendre la cause de la liberté.
Quelques citations de Jean-Paul Marat
Les Chaînes de l'esclavage (1774)
Le peuple ne s'attache qu'à l'écorce des choses, et souffre patiemment le joug, pourvu qu'il ne soit pas apparent.
La trop grande sécurité des peuples est toujours l'avant-coureur de leur servitude.
C'est une des maximes favorites du gouvernement que si les peuples étaient trop à leur aise, il serait impossible de les soumettre au joug.
Ainsi en amollissant et en corrompant les peuples, le luxe les soumet sans résistance aux volontés d'un maître impérieux, et les force de payer du sacrifice de leur liberté le repos et les plaisirs dont il les laisse jouir.
L'Ami du peuple, 2 décembre 1791.
Quoi, la fortune publique sera entre les mains de fripons déhontés qui n'ont pas plus d'ordre que les dissipateurs-escrocs?
Plan de législation criminelle
Toujours une aveugle obéissance suppose une ignorance extrême ...