L’EXEMPLE DU VANUATU
Le courrier d’Opahi Buillard :
Indépendance misère
« Les exemples du pacifique sont peu reluisants ». Cette phrase tirée du billet des nouvelles du 28 septembre 2011 résume à elle seule l’opinion martelée par les autonomistes durant plus de 30 ans. A l’époque, le Vanuatu ancienne colonie franco-britannique indépendante depuis 1980 était déjà pointée du doigt. Ce nouvel Etat, sans argent, sans infrastructure routière, sans système de santé était appelé à sombrer dans la misère la plus sombre, à l’image de ce que vivent encore aujourd’hui les peuples affamés d’Afrique.
Trente ans après qu’est-il advenu de cet Etat ? Avant
de répondre à cette question, il faut bien avoir à l’esprit qu’au moment de leur accession à l’indépendance, les vanuatais vivaient déjà dans ce que la société occidentale qualifie de
« misère ». Le Vanuatu n’a jamais connu la fulgurante modernisation de Tahiti durant leurs années de colonisation. En 1980, le Vanuatu a donc troqué son statut de colonie misère,
pour celui « d’indépendance misère ».
Trente ans après, le peuple vanuatai ne s’est jamais aussi bien porté. Contrairement à tous les pronostics, le pays n’a pas sombré dans le chaos et la misère. Les gens ne meurent pas de faim, il n’y a pas de guerre. Et ils sont surtout moins malades que nous. Ceux qui ont eu la chance d’y aller disent que c’est un peuple heureux. A un détail près. Ils n’ont pas autant de pognon que nous. Ils ne connaissent pas la Porsche Cayenne, pas plus que l’ipad ou autres gadgets de notre société moderne.
Alors pourquoi parler de misère ? A cause du seuil de pauvreté. Cette notion détermine le niveau de revenu à partir duquel un pays est considéré pauvre. Elle permet surtout aux organismes financiers mondiaux (Banque mondiale, FMI…) d’évaluer l’impact de leur action en faveur du développement économique des pays qu’ils aident. Pour faire simple, la misère est donc étroitement liée à la masse d’argent que génère un pays. Plus vous en produisez plus vous êtes riche. A ce petit jeu nous sommes et seront toujours, quoi qu’il advienne à la traine.
Aujourd’hui ce pays avec beaucoup de petites nations est pointé du doigt par les instances internationales. Ils refusent de transmettre les informations sur la provenance des fonds qu’ils accueillent. Est-ce que la mafia et la pègre y règnent en maître absolu ? Non. Certainement moins que cela ne l’a été et l’est toujours en Suisse. Mais bon c’est vrai que la Suisse ce n’est pas le Vanuatu.
Indépendant, le Vanuatu a mis une dizaine d’année pour se remettre sur pied. Aujourd’hui son économie s’est ouverte au monde. Ces îles ont amorcé une croissance économique adaptée à leur rythme et à leur échelle. Le développement durable y est une réalité. Il arrive en 18ème place des « paradis fiscaux où il fait bon d’entreprendre », quand Hong Kong pointe en 3ème position et la France …en 82ème. Et nous là dedans ? Et bien nous, pour tout vous dire on n’existe pas !
Opahi BUILLARD
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Port-Vila
Pour bien comprendre le texte d’Opahi Buillard, il faut savoir que les Nouvelles-Hébrides (ancien nom du Vanuatu) étaient, avant l’indépendance, un condominium.
Le condominium des Nouvelles-Hébrides, en anglais New Hebrides Condominium, était une colonie franco-britannique érigée dans l'archipel des Nouvelles-Hébrides, sur le territoire de l'actuel Vanuatu, du 2 décembre 1907 à son indépendance le 30 juillet 1980...
Régime original dû à l'impossibilité pour l'un et l'autre des deux pays d'abandonner l'archipel, il a la particularité de voir s'exercer trois souverainetés : celles propres des deux États envers leurs nationaux et leurs sociétés, celle du condominium pour les indigènes, les relations entre les différentes nationalités, l'administration et les services condominiaux…
http://fr.wikipedia.org/wiki/Condominium_des_Nouvelles-H%C3%A9brides
C'est-à-dire que les « français » étaient les habitants d’origine française, les « anglais » ceux d’origine anglaise, les autochtones n’étaient… rien ! Ils n’avaient pas de nationalité et ne pouvaient voyager faute de passeport. Seule, la France leur délivrait des laisser-passer pour la Nouvelle-Calédonie (besoin de main d’œuvre) et la Polynésie française.
Je vous recommande le texte du Dr P.R. Joly, ethnographe « Notes sur les Nouvelles-Hébrides », 5 mai 1904, (page 356 et suivantes sur le site Persée).
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1904_num_5_1_7872
Ainsi que le texte de Georges Arnaud « L’influence française aux Nouvelles-Hébrides », 1927, (page 479 et suivantes sur le site Persée).
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1927_num_36_203_9005
La
« GÉOGRAPHIE UNIVERSELLE », 1942, éditeur Quillet, ne consent que quelques lignes aux Nouvelles-Hébrides, aucune carte, ni photo :
« La France en partage la possession avec la Grande-Bretagne.
L'archipel a une superficie d'environ 14.000 km2 et une population de 50.000 habitants. Il relève, pour ce qui est de la part française dans le condominium, de l'autorité du gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, représenté à Port-Vila, la capitale, par un commissaire.
Le sol est très fertile. Les principales productions sont le cacao, le coprah et le coton. Une des îles contient du soufre à haute teneur. La majeure partie des entreprises est entre des mains françaises. Port-Vila est desservi par une ligne des Messageries Maritimes, via Panama et Tahiti. »
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