LA TOLERANCE
http://www.librepensee64.ouvaton.org/Htm/toleran.htm
On ne peut confondre "laïcité" et "tolérance" :
De nombreux pays démocratiques (Pays-Bas, Grande-Bretagne...) ou non (Maroc...) sont tolérants en matière de religion mais cette tolérance est le fruit d'une tradition. Elle est concédée au minoritaire par le dominant. En effet, "ce qui est simplement toléré reste en position d'infériorité par rapport à ce qui est donné comme norme. C'est pourquoi les pays qui respectent la liberté de conscience tout en privilégiant officiellement une confession ne respectent pas strictement le principe d'égalité des citoyens." (Henri Pena-Ruiz)
Mirabeau affirmait de même : "Le mot de tolérance me paraît en quelque sorte tyrannique lui-même puisque l'autorité qui tolère pourrait ne pas tolérer."
Il y a dans le mot "tolérance" une notion de condescendance qui laisse entendre que celui qui tolère le fait par une sorte d'indulgence envers les convictions philosophiques différente des siennes. La tolérance peut cesser instantanément et le respect qu'elle affiche ne dépend que du bon vouloir de celui qui tolère. Ainsi, le blasphème est toléré en Grande-Bretagne malgré l'existence d'une loi qui l'interdit mais cette loi pourrait être appliquée ! C'est la raison pour laquelle des religieux réclament qu'elle le soit et font actuellement pression en ce sens sur le gouvernement britannique. Il existe en Grande-Bretagne une tradition de tolérance et les revendications des religieux n'ont, pour le moment, pas de chances d'aboutir, mais comme il y a prééminence de la loi sur les sentiments et les croyances, la Grande-Bretagne pourrait, en toute légalité, cesser d'être tolérante et poursuivre des individus pour blasphème. Ceci ne peut se produire en France où la laïcité est institutionnelle : chez nous, la loi protège la liberté d'expression religieuse ou antireligieuse. La société française n'a pas besoin d'être tolérante car la Constitution du pays impose le respect, non de la croyance ou de l'irréligion (ce serait prendre parti pour l'une contre l'autre), mais de leur expression. En somme, quelle que soit notre conviction, même si nous n'avons aucune estime pour la conviction d'autrui, nous sommes obligés par la loi commune de laisser les autres exprimer des convictions opposées aux nôtres car la laïcité institutionnelle interdit l'intolérance.
Les adversaires de la Libre Pensée utilisent souvent la tolérance comme argument. Si l'on refuse l'ingérence du pouvoir religieux dans la sphère publique, ils accusent d'intolérance les partisans de la laïcité. Comme on l'a vu, la laïcité est en réalité le meilleur rempart contre l'intolérance puisqu'elle traite à égalité toutes les convictions. N'en favorisant aucune, elle ne convient pas à ceux qui désireraient voir la société civile obéir à leurs lois.
Une excellente analyse de ce qui distingue un sentiment comme la tolérance et un principe comme la laïcité est faite par Danièle Sallenave dans son remarquable texte "Les principes et les sentiments" où elle démontre que les relations humaines doivent se fonder sur la raison et non sur l'affectivité si on veut assurer la paix sociale.
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Note : J’ai remplacé les mots en italique bleus du texte initial par « religieux », pour éviter tout débat sur les différentes religions. Ce n’est pas le but de cet article.
Merci pour cet article à la