PERNETTE DU GUILLET
De la poésie, présentée par Christian Savel :
Pernette du Guillet (1520-1545)
Elle est membre de «l’école lyonnaise», dont le chef de file est Maurice Scève. L'amour fantasmé (et réciproque), qu'elle nourrit pour lui, a largement inspiré sa poésie. Son style nuancé, peut paraître fade et mièvre si on le compare à celui, réaliste et affirmé, de Louise Labé. On ne connaît peu de chose d'elle. Ses poèmes ont été publiés par son mari sous le titre de «Rymes de gentille et vertueuse dame».
Rymes
Qui dira ma robe fourrée
De la belle pluie dorée
Qui Daphnés enclose ébranla :
Je ne sais rien moins, que cela.
Qui dira qu'à plusieurs je tends
Pour en avoir mon passetemps,
Prenant mon plaisir çà, et là :
Je ne sais rien moins, que cela.
Qui dira que t'ai révélé
Le feu long temps en moi celé
Pour en toi voir si force il a :
Je ne sais rien moins, que cela.
Qui dira que, d'ardeur commune
Qui les jeunes gens importune,
De toi je veux... et puis holà !
Je ne sais rien moins, que cela.
Mais qui dira que la Vertu,
Dont tu es richement vêtu,
En ton amour m'étincela :
Je ne sais rien mieux, que cela.
Mais qui dira que d'amour sainte
Chastement au coeur suis atteinte,
Qui mon honneur onc ne foula :
Je ne sais rien mieux, que cela.
(Chanson VII)
La nuit était pour moi si très-obscure
Que Terre et Ciel elle m'obscurcissait,
Tant qu'à Midi de discerner figure
N'avais pouvoir - qui fort me marrissait :
Mais quand je vis que l'aube apparaissait
En couleurs mille et diverse, et sereine
Je me trouvai de liesse si pleine -
Voyant déjà la clarté à la ronde -
Que commençai louer à voix hautaine
Celui qui fit pour moi ce Jour au Monde.
(Epigrammes I-XXV)
(Portrait d'une courtisane, Giralomo Ferrabosco ( ? - 1775), Musée des Offices, Florence, SCALA)