Pacte de Marrakech : beaucoup de fantasmes pour rien
A la suite d'interrogations venant de nombre de gens du Fenua concernant le "pacte" signé à Marrakech il y a quelques jours, nous rappelons que ce texte est assez flou, plutôt décevant et absolument pas contraignant pour les Etats et donc encore moins pour la Polynésie.
À cette occasion, nous souhaitons exprimer notre étonnement sur la place que prend l'immigration dans le débat public et sur les réseaux sociaux de notre Fenua.
Que représentent ces migrations en Polynésie Française ?
Rien. La Polynésie connaît même un déficit migratoire net de plus de 7000 personnes par an depuis 2014.
Par ailleurs, ce débat n'a d'autant pas de sens que notre peuple est, lui-même, le pur produit de nombreuses migrations et, donc, de nombreux métissages.
Que des partis, des faiseurs ou faiseuses d'opinion ou des individus de notre Fenua relaient des nouvelles non fondées sur le plan scientifique, historique, géographique et statistique, véhiculent le racisme, le chauvinisme et la haine de l'autre et colportent ainsi les thèses de l'extrême droite raciste européenne et américaine, cela nous paraît extrêmement grave.
La propagation de ces fantasmes racistes, xénophobes et chauvins construit le repli identitaire qui s'approfondit tous les jours un peu plus dans notre pays. Nous le déplorons et combattrons de toutes nos forces cette haine dénuée de sens pour notre culture si accueillante, chaleureuse et ouverte au monde et à l'autre.
Pour nous, ce sont les politiques d'austérité menées par les gouvernements sous l'égide de l'Union européenne, du FMI, de la Banque Mondiale et des Chicago Boys qui sont à l'origine des difficultés sociales et ses migrations internationales que nous connaissons à travers le monde.
En Polynésie, en France et surtout dans les pays en développement d'où proviennent nombre de migrants, nous produisons des richesses en quantité. et, seules l'inégalité fiscale et sociale peut expliquer les inégalités et donc ces migrations.
Pour nous, les causes profondes des inégalités et des migrations sont à chercher dans la mise en place impossible de systèmes fiscaux égalitaires et redistributeurs dans tous les pays du monde, mais aussi dans la fraude fiscale, dans l'évasion fiscale et surtout dans la liberté de mouvement des capitaux -considérée comme une des « quatre libertés » de l'Union européenne et comme une des priorités de l'OMC-.
En Polynésie, l'inexistence de l'impôt sur le revenu, de l'Impôt de Solidarité sur la Fortune et l'utilisation massive de la défiscalisation -forme légale d'évasion fiscale- pour les plus riches du Fenua et leurs amis exilés fiscaux est la source de nombre de maux polynésiens.
Les plus pauvres de nos Manahune -migrants compris- ne constituent, aux yeux des plus riches, rien d'autres qu'un réservoir de main d'oeuvre et qu'une masse informe, méprisable, et corvéable à merci et qui ne mérite rien d'autre à maxima qu'un peu de charité si possible contrôlée par les Églises.
Bref ici le discours sur les migrations que nous entendons ici n'est bon pour personne si ce n'est pour la classe des 20 familles et de leurs clients qui dominent le Fenua.
Aussi, il est très bizarre que, dans un pays métissé comme le nôtre et fait de métissage et issus lui-même de migrations diverses, le discours de l'extrême droite réussisse à s'imposer.
En tout cas ce que l'on sait c'est que ce discours rejoint celui d'un certain patronat très resserré étonnamment constitué de jet-setteurs, d'opportunistes, de bigots et surtout de profiteurs.
Tous ont en commun : l'intérêt particulier, le mépris de l'intérêt général, le court-termisme, l'individualisme, le manque de coeur et le manque de solidarité.
Et cela nous fatigue.
Dans le Fenua comme en France, l'extrême-droite et cette classe de profiteurs serrent la vis aux plus pauvres (en ne voulant pas d'une augmentation du Smic et en ne souhaitant pas installer l'assurance chômage ou de vrais services publics dans le Fenua), elles votent dans toutes les assemblées où elles sont élues les mesures les plus anti-sociales avec une constance de métronome, et ici comme en France elles font diversion en hurlant contre ce qu'elle appelle « le Grand Remplacement ». Les Polynésiens doivent faire très attention à ce discours ethniciste qui, à la fin, nous divise tous.
Ici comme en France, l'utilisation du spectacle, de la peur et de la haine n'a pas d'autres buts que de conforter un système politico-économique inégalitaire.
Refusons que ce texte anodin soit récupéré à des fins nauséabondes et électoralistes.
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